vendredi 25 mars 2011

Il est souvent difficile d’être musulman en France dans ce climat malsain

L'intervention de Gilles Bernheim, grand rabbin de France, dans "Le Monde" du 23 Mars 2011 éclaire les débats en cours sur l'Islam sous l'angle sempiternel de l'ostracisation.

Si comme lui nous pensons que "les juifs et les musulmans doivent pouvoir assumer et vivre leurs différences dans le respect de la loi républicaine»; en revanche, rappeler à ceux qui outrepassent les barrière de la laïcité dans leur pratique de la religion, n'est pas : "chercher des boucs émissaires".
En quoi nous renvoyons au grand rabbin son diagnostic par la question "mais qui est le plus malade et de quoi?"


A force de prétendre que la défense de la laïcité offense "les musulmans", c'est les musulmans qui ont une vision véritablement laïque de la place de l'Islam dans la société qu'on offusque.
En effet, ces musulmans sont choqués de voir que leur coreligionnaires s'arrogent le droit d'occuper l'espace public pour leur prière du vendredi, mais que la bien-pensance ambiante balance tous ensemble joyeusement dans une même marmite sous un couvercle marqué "islam".
C'est dans cette perception de la diversité des points de vue musulmans que se joue, et se gagne ou se perd la bataille pour la laïcité et le vivre-ensemble.


Affirmant que "Il n'y a aucune contradiction entre laïcité et pratique d'une religion", le grand rabbin occulte tout de même le fait qu'en attaquant la position de la religion sur la place publique, la laïcité constitue de facto un obstacle sinon une contradiction majeure.
La laïcité est à ce point si peu évidente pour les religions que le modèle de laïcité Français est un cas à peu près unique dans le monde. Il constitue un écueil permanent pour les religions qui doivent y laisser une position dominante historique.

L'exemple juif peut être un modèle pour l'islam bien que certains archaïsmes subsistent encore. Par exemple l’abattage rituel commun aux deux religions ne peut en aucun cas prétendre s'imposer à une réglementation républicaine visant à éviter la souffrance animale, ce que conteste en religieux le grand rabbin.

Pour un autre aspect, Gilles Bernheim affirme "Notre calendrier prétendument laïque est ainsi calé sur les fêtes chrétiennes : un enfant, en France, n'aura jamais à manquer l'école pour pouvoir fêter Noël."
L'exemple choisi est très intéressant car si Noël est une fête chrétienne, sa célébration correspond en fait à une fête païenne antérieure en Europe et adoptée à l'origine par les chrétiens pour dynamiser les conversions.
Et alors que les célébrations de la semaines sainte constituent la période la plus importante de l'année pour les chrétiens, ces jours ne sont pas fériés en France alors qu'ils le sont dans nombre de pays catholiques.

Enfin la comparaison d'avec la situation des juifs des années 30 est balayée par Gilles Bernheim comme faisant outrage à la mémoire des victimes de la Shoah.
Cette référence quasi sacrée comme ne prêtant même pas à la discussion mériterait au moins cet éclaircissement que le judaïsme n'avait jamais existé comme religion dominante dans aucun état d'Europe permettant de présumer une quelconque malignité.
L'islam lui a une histoire en Europe, faite d'affrontements que ce soit en Espagne ou dans les Balkans, avec des conséquences encore visibles et que le génocide des Juifs par les nazis fut précédé, sinon inspiré par celui des Arméniens chrétiens par les Turcs musulmans.

Pour respectable qu'elle soit, la position de Gilles Bernheim, grand rabbin de France, rappelle simplement que la laïcité n'est pas l'affaire des religieux, mais bien celle des laïcs.

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